Une bonne gouvernance ça s’anticipe…. mais ça ne s’improvise pas !

Dans les entreprises familiales, le sujet de la gouvernance et de la transmission n’est pas toujours une priorité. Les dirigeants doivent gérer l’entreprise au jour le jour, les actionnaires en sont souvent éloignés, et les jeunes générations se forment et développent leur carrière professionnelle.
Or, il y a de vraies raisons de prendre un temps pour réfléchir à son avenir et à sa gouvernance :
1/ L’âge de la retraite du dirigeant arrive plus vite qu’on ne le pense, une transmission prend en moyenne 7 ans, et mettre en place une nouvelle gouvernance prend également un certain temps… Pour embarquer les nouvelles générations dans l’entreprise familiale, réaliser une transmission effective et réussie, et assurer ainsi la pérennité de l’entreprise familiale, une démarche volontaire est nécessaire.
2/ Le deuxième aspect est lié aux risques du monde VUCA et de la transition environnementale. Il n’est plus vraiment possible de savoir exactement où l’on sera dans cinq ou dix ans, mais il est important de se donner une direction, des ambitions, et de mettre en place une gouvernance qui réponde à ces ambitions dans un monde qui change.
La réunion “Lundi du FBN” “Une gouvernance ça s’anticipe”, organisée par le FBN France, a rassemblé 120 participants (dans 10 villes et en ligne) dont 55% de dirigeants et 45 % de membres de famille entrepreneuriales actionnaires ou opérationnels.
Pour traiter ce sujet et animer ce webinaire, Emilie Bonamy, Présidente d’ELB Conseil, a voulu rassembler des témoins aux points de vue complémentaires et en charge d’une gouvernance dans chacun des “trois cercles” :
– la vision du dirigeant en la personne de Pierre Ippolito, président du Groupe Ippolito et MEDEF – la Présidente du Conseil de surveillance de Payan-Bertrand, Dominique Proal, la Présidente du Conseil de famille du groupe Picoty, Nathalie Carné.
– différentes tailles d’entreprise : PME, ETI, grand groupe
– des now gen et des next gen
– homme et femmes
Tous ont en commun d’ avoir mené un processus de charte familiale avec leur famille et d’y avoir démontré beaucoup de leadership.
Retour sur quelques enseignements phares :
Enseignement n°1 :
Pour prendre conscience de ce besoin d’anticipation il faut qu’il y ait quelque chose qui coince, une émotion forte – une perte, un risque, un obstacle – et parfois les trois, qui soit incontournable et pas forcément SIMPLE à résoudre par le seul dirigeant ou un membre de la famille
Par exemple :
– l’âge de la retraite du dirigeant qui approche à grands ou petits pas
– le décès d’un actionnaire important et la non-préparation de la génération suivante
– l’absence de candidats familiaux next gen pour s’investir dans l’opérationnel
– des divergences sur les critères d’entrée de la nouvelle génération dans l’entreprise, voire
– la peur que le nombre d’actionnaires se multipliant, cela devienne impossible à gérer
– le besoin de se mettre d’accord sur la répartition des parts, notamment de celles du repreneur familial dirigeant
Etc….
Enseignement n°2 :
Les membres d’entreprise familiale qui ont vu le besoin d’évolution de leur gouvernance ont ressenti la nécessité de faire appel à un tiers extérieur NEUTRE compétent pour les accompagner sur ces sujets,
Par exemple, la famille Ippolito et la famille Proal ont fait appel à ELB Conseil en 2020 et 2023 pour un processus de charte familiale, et la famille Picoty a démarré sa charte familiale en 2019 avec un consultant extérieur, et travaille toujours aujourd’hui avec un coach.
C’était il y a 10-15 ans, par ma tante et ma cousine, on a été en contact avec un conseil coach en gouvernance familiale, on s’est lancé dans l’aventure – Nathalié Carné
L’accompagnement par ELB Conseil a été primordial – Dominique Proal
Enseignement n°3 :
La charte familiale est un fabuleux ACCÉLÉRATEUR d’anticipation
La charte familiale est un bon début pour mettre en route sa gouvernance, cela apporte de la structure, du rythme, une implication des actionnaires. La méthode mise au point par ELB Conseil accompagne en même temps le développement du leadership et des talents des membres de la famille, y compris les next gen.
Les trois familles ont réalisé que c’était SURTOUT LE CHEMIN qui était très apprenant : un an et demi en moyenne de réunions et de séminaires, de temps de réflexion et de dialogue, d’écriture, de partage, de validation.
En effet, dans ce chemin, chaque sujet à enjeu évoqué au départ dans « les obstacles » est discuté, trouve des principes de résolution, et permet d’organiser une gouvernance qui sera chargée de traiter les nouveaux enjeux qui pourront se présenter par la suite.
Tous ont dit que le chemin en valait largement la peine et se sont rendus compte de l’immense apport d’un tiers extérieur.
La charte est un prétexte pour échanger sur les sujets de gouervance au sens large du terme et se projeter sur la gouvernance globale – Pierre Ippolito
Le processus de charte nous a amené à avancer étape par étape. Et quelques fois, nous en avons compris le sens après – Dominique Proal
On a tout mis à plat de A à Z dans ses moindre détails, distribution de dividendes, qui va entrer dans l’entreprise, ça a ouvert des débats – Nathalie Carné
Enseignement n°4 :
Grâce à ce « reset » de la gouvernance familiale et actionnariale, la gouvernance peut continuer à se structurer étape par étape à tous les étages de l’entreprise familiale, y compris côté conseil d’administration et opérationnel, voire société à mission.
Le fait d’explorer tous les sujets à enjeux résout les sujets non traités jusqu’alors relevant de la famille et de l’actionnariat et permet de professionnaliser la gouvernance d’entreprise.
La charte est une brique, c’est la première brique de la gouvernance. Savoir où on positionne la première brique, ça positionne la maison – Pierre Ippolito
Ce travail m’a aidé personnellement à passer d’un état d’amateurisme et de grande ignorance de mon rôle d’actionnaire à une implication plus concrète dans mon rôle de Présidente du Conseil de surveillance – Dominique Proal
Notre patrimoine est clairement passif. Maintenant que la génération 4 est plus qualifiée, ils sont moteurs, on a créé un « cercle d’actionnaires », on se met du temps pour parler de tout çà. – Nathalie Carné
Aujourd’hui, ça a évolué, la vision stratégique est portée et validée par le conseil de surveillance avec des personnes extérieures à la famille ce qui a été validé par l’actionnariat, elle est hyper robuste – Pierre Ippolito
On doit faire transpirer cet ADN de la charte pour qu’il se transmettre aux collaborateurs, et pour jouer notre rôle sociétal sur son territoire – Pierre Ippolito
Par ces citations, on voit bien à quel point la charte est le socle du développement futur de la gouvernance, et qu’elle a créé une équipe interne capable de s’emparer des sujets et de les “anticiper” pour poursuivre la construction d’une gouvernance ajustée.
Enseignement n°5 :
Anticiper sa gouvernance, c’est se donner le temps entre actionnaires de discuter des enjeux à résoudre, de dégager une vision partagée sur le sujet et de mettre en place, brique par brique, des principes et des règles, des instances dont les missions sont bien définies, et des rôles clairs assignés aux différents membres de la famille et aux externes.
En revanche, comme je peux malheureusement le rencontrer dans certaines familles, poser des instances sans en avoir vraiment compris le sens, défini la mission, et la bonne composition peut être délétère, et conduire à une confusion qui rejaillit négativement sur la dynamique de la famille.
En conclusion, une gouvernance ça s’anticipe, mais ça ne s’improvise pas !